Après avoir assuré pendant plusieurs semaines que les masques devaient être réservés aux malades et aux soignants, l’exécutif semble le recommander maintenant pour toute la population.

Au début de la crise, ils n’étaient jugés utiles que pour les malades et les soignants. Désormais, les autorités, en France ou encore aux Etats-Unis, encouragent le public à porter des masques pour se protéger du coronavirus.

L’Académie de médecine, vendredi, a notamment recommandé le port du masque en guise « d’addition logique aux mesures barrières actuellement en vigueur ». Quelques heures plus tard, c’est le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, qui répète cette recommandation. « Nous encourageons le grand public, s’il le souhaite, à porter […] ces masques alternatifs qui sont en cours de production », a-t-il affirmé lors de son habituel point de suivi.

Ces masques alternatifs, en tissu notamment, devraient surtout servir de barrières à postillons. Ils sont « destinés à la population générale ou ceux qui entrent en contact avec beaucoup d’autres gens dans le cadre de leur activité professionnelle. Ils sont en train d’être produits. L’objectif est d’en produire plus de 5 millions par semaine », avait précisé le Premier ministre lors d’une audition à l’Assemblée de la mission d’information des députés sur l’épidémie.

Lors de cette audition, Edouard Philippe avait pourtant fait part de son scepticisme sur l’utilité des masques. Le directeur de l’OMS pour les programmes d’urgence « dit qu’il n’y a pas de preuve que le port du masque dans la population apporterait un bénéfice. Ce serait même plutôt le contraire, à cause d’une mauvaise utilisation », a-t-il rappelé. Avant lui, c’était Sibeth Ndiaye, ou encore Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, qui jugeaient inutiles l’achat et l’usage de masques pour toute la population.

Pourquoi un revirement aussi soudain ? Selon les promoteurs du port généralisé du masque, ce discours était avant tout destiné à éviter que le grand public se rue sur ceux réservés aux soignants (les masques chirurgicaux et les FFP2, plus protecteurs) et aggrave une pénurie déjà existante.
« Il y a une vraie inflexion aux Etats-Unis et l’OMS est en train de réviser ses recommandations », ajoute quant à lui le Pr KK Cheng, spécialiste de santé publique à l’université de Birmingham (Angleterre), favorable au port généralisé du masque.

Aux Etats-Unis, les autorités ont elles aussi fait volte-face. A New York, un des plus gros foyers épidémiques du pays, le maire Bill de Blasio a appelé sa population à se couvrir le visage à la moindre sortie. « Ça peut être une écharpe, quelque chose que vous avez fabriqué, un bandana », a-t-il affirmé.

Des transmissions en parlant ?

L’idée a été suivie par le président Donald Trump, qui a dit à tous les Américains de se couvrir le visage vendredi. On suspecte que « le virus puisse se transmettre quand les gens ne font que parler, plutôt que seulement lorsqu’ils éternuent ou toussent », a déclaré sur Fox News le très respecté spécialiste américain Anthony Fauci, conseiller du président.

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De son côté, l’OMS s’en tient encore à sa position initiale, en craignant que l’usage généralisé du masque donne un « faux sentiment de sécurité » et fasse oublier les indispensables mesures barrières (distanciation sociale, lavage des mains…)

Toutefois, son patron, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a concédé mercredi qu’elle continuait à « évaluer l’usage potentiel du masque de manière plus large ». « La pandémie évolue, les preuves et nos avis aussi », a-t-il glissé.

Des tutoriels de fabrication de masques artisanaux circulent largement sur Internet, parfois émanant d’hôpitaux ou de sociétés savantes. Le collectif français Stop postillons en propose sur son site (stop-postillons.fr). Lancé par des médecins, il parle « d’écrans anti-postillons » pour le grand public plutôt que de masques, afin d’éviter les confusions avec le matériel pour soignants.