L’université de Bordeaux a lancé début 2020 l’étude Cyberlife qui s’intéresse à l’usage par les adolescents des réseaux sociaux.

Comment cela influence leur réussite scolaire et dans quelles mesures cela augmente leur exposition au cyberharcèlement ?

Les réseaux sociaux ont évolué à toute vitesse ces dernières années et avec eux les comportements des adolescents. L’étude Cyberlife ambitionne de faire un état des lieux, en Gironde, de l’exposition des collégiens d’aujourd’hui à ces nouveaux outils, omniprésents dans leurs vies.

Aujourd’hui, ils ne sont plus sur Facebook ou Twitter mais utilisent plutôt Snapchat, Instagram ou Tiktok. Or, la plupart des études dont disposent les chercheurs en psychologie s’intéressent à la consommation et aux effets de contenus Facebook sur les comportements des adolescents et, pour la plupart, elles ont été réalisées aux Etats-Unis ou dans les pays scandinaves comme la Norvège.
Partant de ce constat, Mathilde Husky, professeur de psychologie à l’université de Bordeaux, a répondu à un appel à projets de l’agence nationale de la recherche pour lancer une étude orientée sur l’impact des réseaux sociaux sur la réussite scolaire des adolescents et sur leur exposition au cyber-harcèlement. L’étude Cyberlife a été lancée en Gironde début 2020 et va impliquer 4.000 collégiens suivis sur trois ans, de la 5e à la 3e, leurs parents ainsi que le personnel éducatif.

Un questionnaire en ligne adapté et anonyme
« Les parents seront interrogés sur les règles liées à Internet qu’ils ont fixées chez eux, par exemple sur une limite à la durée de la consultation en ligne etc., explique Mathilde Husky, investigatrice principale de l’étude Cyberlife. Les adolescentspourront eux-mêmes raconter comment ils utilisent les réseaux sociaux via un questionnaire en ligne, adapté et anonyme ».

Elle soupçonne un décalage assez conséquent entre la vision parentale et la consommation réelle des adolescents. « Je sais par exemple que certains d’entre eux s’inscrivent sur Tinder au collège et pour faire quelque chose de sensé par rapport à ce phénomène, il faut connaître son ampleur », avance-t-elle.

L’étude permettra de comprendre s’il y a un seuil de consommation acceptable à ne pas dépasser, au-delà duquel le risque de développement de troubles (en lien avec l’estime de soi, des symptômes anxio-dépressifs) est accru ou si c’est davantage les profils psychologiques des adolescents qui sont en jeu.

Elle va aussi s’intéresser au phénomène de cyberharcèlement qui n’est pas sans effet sur la vie scolaire, même quand les portables sont interdits dans l’enceinte des établissements. « Les collégiens peuvent par exemple appartenir à des groupes Snapchat actifs les soirs et le week-end, souligne Mathilde Husky. Il n’est pas rare que les débordements, propos inappropriés ou menaçants qui peuvent y être tenus reviennent alors au sein de l’école ». La pratique de jeux en réseaux, dont sont friands les adolescents, peut aussi donner lieu à des bagarres aux collèges.
« On ne connaît pas la concordance entre le harcèlement et le cyberharcèlement, insiste l’investigatrice principale de l’étude. Derrière l’écran, ce ne sont pas forcément les mêmes élèves que ceux connus du personnel éducatif qui vont avoir des comportements répréhensibles ».

« Alimenter une politique de prévention »
Des analyses des données récoltées seront menées tout au long de l’enquête et à l’issue des trois ans. Au-delà des publications scientifiques, il y aura la volonté d’alimenter une politique de prévention. Si les financements le permettent, l’ambition des porteurs de l’étude est de continuer à suivre la cohorte au lycée puis à l’université. La méthode pourrait aussi éventuellement être mise à disposition d’autres académies, sous réserve là aussi des financements nécessaires.

Source20minutes