Le gouvernement a approuvé un amendement au code pénal criminalisant les mutilations génitales féminines, qui touchent près de neuf Soudanaises sur dix.

Au Soudan, la technique de mutilation génitale des fillettes et des jeunes femmes la plus répandue est appelée «excision pharaonique». C’est la plus ancienne -elle est parfois attribuée à une tradition datant de l’Egypte antique- et aussi l’une des plus extrêmes. L’Organisation mondiale de la santé la classe en «type 3».

Alors que le «type 1», ou clitoridectomie, implique «l’ablation de la pointe du prépuce, avec ou sans excision partielle ou totale du clitoris», le type 3, souvent qualifié d’infibulation, «est la forme la plus radicale de l’excision, qui implique l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes, suivie de la suture de l’orifice vaginal, ne laissant qu’une petite ouverture pour l’écoulement de l’urine et du flux menstruel», décrit une étude universitaire parue en 2001.

Les mutilations génitales concernent 87,6% des femmes âgées de 15 à 49 ans au Soudan, l’un des taux les plus élevés au monde. Seuls la Somalie, le Mali, la Guinée et Djibouti affichent des chiffres encore plus hauts. Après des années de lutte de la part des associations et des organisations de défense des droits humains, la loi soudanaise devrait bientôt interdire cette pratique. Un amendement au code pénal, qui rend leurs auteurs passibles de trois ans d’emprisonnement et d’amendes, a été approuvé par le gouvernement. Il se trouve désormais en attente d’une promulgation.

Un premier projet de loi contre l’excision avait été abandonné en 2015, sous la pression de l’aile conservatrice du régime. Mais la chute du dictateur militaro-islamiste Omar el-Béchir, l’an dernier, a fait souffler un vent de libération sur le Soudan. Certes, les militaires conservent encore la moitié des sièges du Conseil souverain, et ils président pendant les premiers vingt et un mois cet organe chargé de piloter la transition.

Mais le nouveau gouvernement, avec à sa tête le Premier ministre Abdalla Hamdok, un économiste respecté, est largement dominé par des civils. Après avoir dissous l’ancien parti islamiste du Congrès national, celui-ci a abrogé cet automne une série d’articles condamnant les femmes en cas d’«actes indécents et immoraux» dans l’espace public, une législation largement utilisée par les nervis du régime pour réprimer et humilier les Soudanaises, qui pouvaient être emprisonnées, voire fouettées, pour le simple fait de porter un pantalon.

L’Unicef s’est réjoui de l’annonce de cet amendement, présenté comme «une nouvelle ère pour les droits des filles au Soudan», même s’il doit encore être ratifié par le Conseil souverain avant sa promulgation. De plus, «la loi seule ne suffit pas», a prévenu Manal Abdel Halim, de l’association Salima, qui lutte contre l’excision, auprès de l’Agence France Presse. «Nous avons toujours besoin de plus de campagnes de sensibilisation.»

En Egypte voisine, les mutilations génitales féminines sont ainsi interdites par la loi depuis 2008, et punie de peines allant jusqu’à sept ans de prison. Or, selon une enquête menée en 2015, 80% des femmes et adolescentes de 15 à 24 ans y étaient toujours excisées.