S’il est indispensable de parler sexualité dans son couple, cela n’est pas toujours facile. La sexologue Camille Bataillon explique comment le faire avec tact et quelles erreurs éviter.
A quand remonte notre dernière discussion sexe avec notre homme ? Si l’on se pose la question, c’est que cela commence à dater. Et pourtant, on le sait toutes : parler sexe c’est important. Pour exprimer les positions que l’on préfère, ses goûts, ses attentes ou encore ses fanfasmes… Mais aussi pour se rassurer ou pour connaître le ressenti de l’autre… Parler d’intimité est absolument nécessaire pour vivre une sexualité épanouie avec son partenaire.
Oui mais voilà, on a souvent d’autres soucis en tête et on remet la discussion à plus tard. Résultat : des non-dits s’accumulent au fil des années. Aujourd’hui, on a envie que ça change. Crever l’abcès est un passage obligé pour se remettre en phase, éprouver à nouveau de la satisfaction sous la couette… et se sentir mieux au quotidien. Comment aborder un sujet aussi épineux ? Avec tact…
Conseil 1 : Aborder le sujet avec tact
Difficile de poser le sujet sur la table, de but en blanc, entre le plat et le dessert… Notre compagnon n’est pas forcément prêt à entendre ce qu’on a à lui dire, et on risque en plus de se lancer dans la discussion avec des reproches. “Il faut trouver un moyen détourné, comme un article qui en parle dans un magazine, ou un livre”, recommande la sexologue Camille Bataillon. Cette stratégie rend l’information moins ‘émotionnelle’, et elle crédibilise en même temps notre démarche. “Le partenaire peut se rendre compte que des spécialistes conseillent de mieux communiquer sur la sexualité dans le couple, et que c’est donc un sujet important”, conclut la sexologue. Autre possibilité : l’amie imaginaire. Plutôt que de parler directement de soi, on tâte le terrain en expliquant à notre compagnon que l’on a récemment évoqué le sujet avec une amie, qu’elle a entamé cette démarche d’échange avec son partenaire, et que cela leur a fait du bien à tous les deux.
Conseil 2 : Ritualiser les discussions sexo
Une fois ces premières approches effectuées, on doit sentir quand l’autre est prêt à s’ouvrir : c’est le moment de s’engouffrer dans la brèche. Que l’on puisse entamer la discussion dans la foulée ou non, il y a peu de chances qu’un seul échange suffise. La communication doit devenir une nouvelle habitude. “Il faut créer un espace, sinon ce n’est jamais le bon lieu, ni le bon moment, explique la spécialiste. Cela doit devenir un temps ritualisé, qui revient par exemple tous les mois.” On s’est rencontré un 25 juillet ? Gardons le 25, et décidons d’en faire une habitude agréable, par exemple autour d’un bon dîner. Chacun peut faire le point sur ce qu’il ressent, ce qu’il a pensé de la précédente discussion, et ce que ça lui inspire aujourd’hui, avec le recul. À force de répétitions, expliquer les choses devient plus facile. On se surprend à lancer des sujets que l’on n’osait pas forcément aborder la première fois, comme les pratiques sexuelles qui nous plairaient, celles que l’on a testées, mais que finalement on n’apprécie pas, ou encore ce que l’on aimerait expérimenter, mais qui nous semble très osé.
Conseil 3 : exprimer son ressenti plutôt que faire des reproches à son partenaire
Pour que la discussion se passe bien et soit efficace, il faut à tout prix éviter les jugements et les récriminations, même si on en a très envie. La bonne méthode : ne parler que de ses ressentis, en utilisant systématiquement le “je”. Par exemple, mieux vaut dire “je me sens triste quand tu t’endors sans m’embrasser”, plutôt que “tu ne devrais pas t’endormir sans m’embrasser”. “Ce n’est pas évident, admet Camille Bataillon, mais gardons en tête que le tu tue !” En tout cas, il mine assurément la communication. Accepter de se livrer offre bien plus de chances de succès. On aborde les émotions qui nous traversent, et les pensées qui nous ont amenée à vouloir parler de notre intimité à deux. Cette stratégie entraîne souvent l’autre à s’ouvrir également… mais pas toujours. Si ce n’est pas le cas lors des premières discussions, on peut encourager notre partenaire, toujours en parlant de notre propre ressenti : “j’aimerais également savoir ce que tu éprouves, ce que tu aimerais”, “c’est important pour moi de mieux te comprendre”. Même si on ressent de l’agacement, mieux vaut ne pas s’énerver, et ne pas chercher à forcer l’autre, sous peine de provoquer l’effet inverse de celui escompté.
Conseil 4 : accepter que bien communiquer peut prendre du temps
Les premiers résultats ne sont pas forcément à la hauteur de nos attentes, surtout si la démarche s’est révélée laborieuse. Est-ce de notre faute ? On a trop souvent tendance à le penser. Il faut pourtant se rappeler que la communication se fait à deux… “Beaucoup de femmes croient qu’elles ont commis une erreur, souligne Camille Bataillon. Il faut absolument déculpabiliser, car la prise de conscience doit être mutuelle pour parvenir à améliorer la communication dans le couple. Un seul partenaire ne peut pas assumer cela tout seul.” Il est aussi très probable qu’un premier résultat décevant ne signifie pas un échec complet. “Beaucoup d’hommes ont été éduqués à ne pas parler de leurs émotions, ce qui constitue un frein par la suite, rappelle la sexologue. Mais cela ne veut pas dire que le message n’est pas passé : peut-être fera-t-il savoir par ses actions que des choses ont changé.” L’important est de ne pas abandonner. Même si cela prend plus de temps que prévu, on a tout à y gagner !