RMC Sport: Clarisse Agbégnénou, dans quel état d’esprit êtes-vous à l’orée de ce retour en compétition ? Stressée ? Impatiente ? Heureuse ?Clarisse Agbégnénou: Je n’ai pas trop de sentiments. Je me dis “on va y aller”. Ma vie de maman est tellement à mille à l’heure que je n’arrive pas à penser à d’autres choses. Peut-être que c’est un mal pour un bien. Comme c’est avec le club de Champigny et les copines, ça fait plaisir.

Combattre pour un retour avec vos amies du RSC Champigny, c’est peut-être plus simple ?C’est ça. Ça va être bon enfant, ça va être super. On a une bonne équipe au club. On va toutes se motiver.

Pourquoi revenez-vous maintenant ?Déjà, le club m’a proposé. S’il ne m’avait pas proposé, je ne sais pas si j’aurais fait cette compétition. Après avoir reçu la proposition, j’ai dit qu’on allait voir étape par étape et qu’on ferait un point début novembre pour savoir si je me sens bien et si je suis prête. Après ce point, j’ai vu que je m’entraînais assez correctement, même s’il y a pas mal de choses à faire. Alors, si c’est pour aider l’équipe et le club, ça fait une bonne reprise avant de reprendre tranquillement l’année prochaine.

“Pour quelqu’un qui a accouché il y a cinq mois, je n’ai rien à me reprocher”

Pendant votre grossesse, puis après l’accouchement, on vous a vu beaucoup vous entraîner. Vous n’avez pas laissé de place à une éventuelle retraite.Non, je savais que j’allais reprendre. Tant que j’accouchais correctement, que mon enfant était en bonne santé je savais que j’allais reprendre en vue de Paris 2024. Quand? Je n’avais pas de date en tête. J’attendais que mon corps revienne et que je retrouve des sensations. Avec le club, ça me permet de prendre dans une autre atmosphère, plus sereine. Je ne pensais pas reprendre aussi vite. Ça va être bien et cool.

Avez-vous retrouvé le même corps qu’avant la grossesse?Je n’ai pas retrouvé le même corps encore. Il faut un peu de temps. Comme on dit, neuf mois dedans, neuf mois dehors. Je me dis que dans quatre mois je serai encore plus en forme. Pour quelqu’un qui a accouché il y a cinq mois, je n’ai rien à me reprocher. Je ne me dis pas que je ne vais pas y arriver. Je sais que le corps a une bonne mémoire. J’ai bien repris, avec un bon rythme d’entraînement pour quelqu’un qui a accouché il y a cinq mois. Je suis confiante sur ça.

Dans quelle catégorie vous verra-t-on en Géorgie ?Ce week-end, on me verra en moins de 70 kilos. Comme je l’ai dit au club, c’est une compétition où je ne vais pas me forcer de descendre en moins de 63 kilos même s’il y a deux kilos de marge. L’objectif est de redescendre au poids tranquillement, tout en continuant mon allaitement. J’allaite ma petite à 100%. Je fais étape par étape, je descends doucement mais sûrement. C’est un poids que je veux installer, ne pas faire de gros régimes. Je pense que je suis trop vieille pour ça. Je n’ai pas la force et la patience pour les gros régimes. Je vais descendre kilo par kilo avec ma nutritionniste. Tout est timé pour la reprise l’année prochaine. On verra sur quelles compétitions avec les entraîneurs.

“Je ne pensais jamais reprendre fin novembre”

Sur votre forme optimale, comment vous estimez-vous ?C’est difficile de dire ça. Je suis dure avec moi-même. Je dirais 50%. Je suis en train de monter doucement. Allez, 45%.

On est dans une phase de construction ?L’idée c’est de se dire que l’an prochain je reprends petit à petit. Que, milieu d’année et fin d’année 2023, je sois à 100% pour l’année 2024. C’est ça le but.

Ce samedi, vous n’accorderez pas beaucoup d’importance à une défaite ?Oui. Peu importe. C’est une compétition par équipe. On apporte tous un point, ou pas. On se sauvera s’il faut. J’ai juste envie de m’amuser, peu importe ce qui se passera. Je suis une compétitrice je ferai tout pour gagner. Mais si ça n’arrive pas, pas de problème.

On sent dans vos paroles que vous vous donnez le temps.C’est sûr. Je ne pensais jamais reprendre fin novembre après un accouchement. Ce n’est pas tout le monde qui le fait. Je le fais avec toute mon énergie et mon cœur, c’est pour prendre du plaisir, des repères, des marques, même avec la petite qui me suit un peu partout. Ça fait aussi cinq mois que je n’ai pas dormi quatre heures d’affilée. C’est étape par étape. C’est histoire de dire: “Je remets un pied dans la compétition”. Je remets certains réglages, j’ai le temps. Après ces réglages, on va peaufiner avec les coaches pour que j’arrive à mon meilleur niveau pour Paris 2024. Avoir la médaille d’or à Paris, c’est ça qui prime.

Vous dites que vous ne faites pas de nuits complètes. La veille de la compétition, envisagez-vous de laisser votre enfant à quelqu’un pour avoir un plein repos?C’est inenvisageable. Je l’allaite à 100%. Elle n’a jamais pris de biberon. Je n’ai jamais tiré mon lait, elle ne connaît pas. Je ne vais pas lui faire ça la veille d’une compétition. Ça ne serait pas bénéfique pour elle et pour moi. Deuxièmement, c’est ma force. Je préfère continuer à faire mes nuits comme je le fais. J’arrive très bien à faire mes journées. Je suis là pour ma fille en priorité. Le reste c’est du plus. Je veux qu’on vive ça ensemble. On vivra ça ensemble.